Newsletter de l'UNAPL Occitanie - N° 30 - Mai 2023


 
SANTÉ
Médecins : une profession en souffrance
L’après-pandémie a mis en exergue les grandes difficultés auxquelles se heurte le corps médical : burnout, insécurité, temps gâché, déséquilibres territoriaux, déserts médicaux… Les problèmes sont multiples, les solutions à mettre en œuvre sont urgentes.

Dire que la santé va mal est un euphémisme. Dire que la médecine va mal relève encore plus de ce constat. Le système de santé est à bout de souffle, les médecins encore plus. Depuis plusieurs années, les praticiens, dans leur ensemble, alertent sur la gravité de la situation et manifestent afin d’essayer de se faire entendre. Une démarche que beaucoup considèrent comme vaine, en regard de l’augmentation des consultations de 1,50 €, mesure qui apparait bien dérisoire face à l’ampleur des problèmes.

Présidente de l’UNAPL Occitanie, le Dr Marie-Ange Boulesteix tient à sensibiliser l’ensemble de la profession médicale afin de peser le plus possible auprès des pouvoirs publics. Même si elle peut sembler moins défavorisée que d’autres, la région est marquée dans le domaine de la santé par de profonds déséquilibres et d’importantes inégalités territoriales. Avec un phénomène inquiétant, comme partout ailleurs : le mal-être, l’épuisement, le renoncement. Nombreux sont les médecins qui aujourd’hui « déplaquent ».

Littéralement, ces praticiens enlèvent la plaque qui, au sein des villes ou des bourgs, signalait leur présence et donnait accès à leurs cabinets. Où vont-ils ? Vers le salariat, vers les laboratoires, vers l’étranger… En 2022 on a recensé 4000 départs de médecins à l’étranger. Il faut préciser que dans plusieurs pays voisins, la consultation est rémunérée à un niveau beaucoup plus élevé.

« Ce fût pendant bien longtemps, explique le Dr Jean-Marcel Mourgue, président de la commission des jeunes médecins du Conseil national de l’Ordre, un sujet tabou que d’admettre que le médecin pouvait être à son tour en détresse morale et physique, altérant aussi le principe de l’invulnérabilité du médecin et rompant une image particulière de celui-ci au sein de la société. »

La mauvaise santé du corps médical est notée dès le stade des études, du fait des grandes difficultés du secteur public hospitalier. Avec une conséquence : le choix d’un trop grand nombre d’internes ou de chefs de clinique de ne pas opter pour la médecine de ville, cœur de la pratique libérale.

Des études récentes tendraient à établir que plus d’un médecin sur deux, en ville ou à l’hôpital, serait en burnout. Celui-ci prend la forme d’une lassitude, d’une perte de sentiment d’accomplissement, de déshumanisation de soi. Il est constaté que des situations de burnout peuvent être responsables de dépressions, d’addictions, d’infarctus du myocarde, d’AVC ou plus tragiques, de suicides.

Les difficultés touchent plus particulièrement les praticiens exerçant dans les zones sensibles, c’est-à-dire sous-denses, dénommées usuellement « déserts médicaux ». Cette situation a conduit l’Académie nationale de médecine à établir un état des lieux précis et à formuler des recommandations.

Les mesures proposées vont bien sûr alimenter un débat soutenu avec les organisations syndicales de la profession. Elles reprennent certaines propositions déjà largement évoquées et en ajoutent d’autres au contenu plus novateur.

L’Académie nationale de médecine a défini deux niveaux d’urgence.

En urgence 1 il est recommandé : l’instauration d’un service médical citoyen d’un an pour les jeunes diplômés ; un accès plus facile au cumul emploi-retraite des retraités en permettant à leurs cotisations de générer des droits supplémentaires ; une facilitation de l’exercice multi-site ; une sensibilisation de la population au respect des rendez-vous médicaux…

En urgence 2, l’Académie préconise de : rendre du temps médical aux praticiens en optimisant les délégations de tâches à d’autres professionnels de santé et en allégeant la charge administrative ; promouvoir et faciliter l’exercice et les installations précoces dans les zones sous-denses ; renforcer la sécurité des médecins dans les zones sensibles ; réactiver les visites à domicile à l’aide d’une valorisation financière ; densifier localement les interactions avec l’hôpital ; augmenter significativement le « numerus apertus » ; diversifier l’origine territoriale et sociale des étudiants par des incitations et accompagnements dès le lycée ; éviter toute coercition concernant l’installation en médecine libérale…